J'aimais tant

J’aimais tant les nuits d’été que seul a mon pays
Et les mille feux de ses faubourgs,
La cathédrale en moi que j’avais bâtie
Pour y attendre encore ton amour.

J’aimais tant les soirs d’hiver passés parmi les miens,
Les matins de brume sur la campagne,
Tes cheveux clairs qui s’échappaient de mes mains
Comme un ruisseau du flan des montagnes…

Et pourtant, pourtant,
Quand je t’ai vue avec lui,
Me laissant, riant,
Dans un manteau de pluie,
Je t’ai haïe,
Et le monde aussi.

J’aimais tant au réveil écouter la vie chanter
Dès les premiers rayons du printemps,
Me balader sur les dunes et t’adresser
La mer écumant ses chevaux blancs.

J’aimais tant rester à Paris me faire un “ciné”,
Avec toi le dimanche en automne,
Le nom secret qu’un soir tu m’avais donnée
Sur un lit de roses pour me faire homme…

Et pourtant, pourtant,
Quand je t’ai vue avec lui,
Me laissant, riant,
Dans un manteau de pluie,
Je t’ai haïe,
Et le monde aussi.

Je suis sorti seul et par derrière,
Je m’en rappelle comme si c’était hier,
J’ai couru, mais mon ombre était déjà
Celle d’une croix…

J’aimais tant rester longtemps là, et volets fermés,
Sous le vent sucré de tes caresses,
Soit je sui vraiment né ici pour aimer,
Soit je m’en étais fait la promesse…

Et pourtant…
Me laissant, riant…
Je t’ai haïe,
Et le monde aussi…

 

Fabrice Beauvoir